Transmutation d’un quartier :
de la rue Faidherbe à l’Avenue de l’Europe
Ce travail a été réalisé durant l’été caniculaire de 2003. Tous les jours, matin et soir, je suis passé par là pour me rendre à mon travail et en revenir, durant près de deux ans. J’ai pu donc voir, durant cette période, se transformer ce quartier, cette rue, à cheval sur les communes de Courbevoie, la Garenne-Colombes et Bois-Colombes, dans les Hauts-de-Seine, et se voir pompeusement rebaptisée par quelques hiérarques locaux “Avenue de l’Europe”, alors que les français n’avaient encore pas dit non majoritairement au référendum sur l’Europe et ne s’étaient pas encore vu désaisis de leur vote.
Ainsi, un quartier, une rue, ouverte par quelques HLM en rénovation, coupée par des voies SNCF et bordées de quelques pavillons, de petits immeubles de briques marronnasse, de garage, de cafés, de boutiques d’artisans et d’usines, de toute une architecture du quotidien, se voyait complètement transformée.
Des pans entiers d’un quartier disparaissaient. Une partie de sa mémoire partait dans les gravats. Cela m’affectait. Non que j’y sois personnellement attaché, mais cette perte me touchait. Encore une fois on amputait une mémoire ouvrière, on la massacrait, et on l’habillait d’une Europe faussement consensuelle pour y construire des immeubles de bureaux et des logements froids qui étaient déjà morts avant de naître.
J’ai donc, cet été là, durant plusieurs jours, pris le train bien plus tôt que mon horaire coutumier pour me laisser le temps de réaliser ce travail et avoir la bonne lumière, avant d’aller bosser.
Ces quelques photographies se veulent donc non seulement traces, comme toute photographie, mais aussi témoignage et rêveries. A vous de les découvrir, et de voir si elles trouvent une résonance au fin fond de vous.